L’évolution du trèfle blanc dans les prairies est liée à la gestion pastorale
Les légumineuses sont reconnues pour augmenter la fertilité du sol grâce à la fixation symbiotique de l’azote, nourrissant à la fois la vie microbienne du sol et la plante. La gestion pastorale influence la proportion de légumineuses dans la prairie.
Le trèfle blanc, la légumineuse prairiale par excellence
La fixation de l’azote de l’air par les légumineuses est réalisée grâce à l’association entre la plante (trèfle blanc) et des bactéries (rhizobium). C’est une symbiose. Les bactéries, en pénétrant les racines de la légumineuse, forment des excroissances appelées nodules. Ces nodules sont actifs dès 6 semaines après implantation.
La symbiose satisfait les besoins de la plante et des bactéries. D’un côté, les bactéries, par l’action de leurs enzymes nitrogénases, fournissent à la plante des substrats azotés sous forme d’ammoniac, une forme d’azote utilisable par les plantes. De l’autre, la plante, par des exsudats racinaires des substrats carbonés (sucres, acides aminés…), fournit une source d’énergie issue de sa photosynthèse.
La plupart des nodosités sont localisées entre 2 et 20 cm, mais elles peuvent descendre jusqu’à 50-60 cm de profondeur en situation favorable.
Le bon fonctionnement des nodosités dépend des conditions atmosphériques du sol (liées à la structure et au régime hydrique) : un excès d’oxygène limite la fixation de l’azote et un déficit d’oxygène entraîne la mort des bactéries symbiotes. Dans les prairies gorgées d’eau, l’enracinement reste superficiel puisque l’oxygène manque en profondeur. Par conséquent, les plantes sont plus sensibles au dessèchement estival.
L’activité des nodosités peut s’évaluer par l’observation de leur couleur. La couleur rose révèle la présence de léghémoglobine, intervenant dans la fixation d’azote. A l’inverse, la couleur blanche révèle un défaut de fixation : les bactéries consomment de l’azote. Enfin, la couleur brune signifie que les nodosités se nécrosent.
La quantité d’azote fixée par l’association du trèfle blanc et des bactéries peut s’élever à 200 unités. Le niveau de fixation est surtout dépendant du besoin de la plante, de la santé des bactéries et de la quantité d’azote disponible dans le sol.
Un développement en plusieurs étapes
Lors de ses deux premières phases d’implantation (phase rosette et phase d’expansion), le trèfle développe en surface une tige primaire composée de 2 à 6 ramifications. Sous terre, c’est un système d’enracinement pivot puissant qui se met en place, pouvant descendre jusqu’à 80-100 cm. Ces pivots disparaissent au bout de 1 à 2 ans, laissant place aux racines adventives qui se développent sur les stolons. En effet, les stolons s’enracinent au fur et à mesure de leur progression (phase clonale). Les racines adventives colonisent les 15 premiers centimètres de la couche arable. Lorsque la structure du sol le permet, ces racines adventives colonisent le sol plus en profondeur, rendant les plantes plus résistantes aux conditions sèches.
Une évolution au fil des saisons
La période hivernale est cruciale pour la productivité et la longévité du trèfle blanc. En effet, c’est en fin d’hiver que la croissance des racines est maximale et que les nodosités se créent.
Au début du printemps, les vieux stolons (tiges rampantes) meurent. C’est aussi la période où la partie aérienne croît rapidement et où de nouvelles ramifications se forment avec l’expansion des stolons. Ces derniers s’enracinent aux nœuds pour former de nouvelles plantes. Les stolons rampants s’enracinent au fur et à mesure de leur progression tant que les conditions météorologiques sont favorables. Ces racines restent plus souvent superficielles (0-10 cm), ce qui induit une résistance limitée à la sécheresse. Là encore, si le sol est meuble, ces racines peuvent se développer plus profondément. Les ramifications se forment au début de l’été, période où la croissance de la partie aérienne est maximale, et cela jusqu’à l’automne.
A l’automne, l’activité des lombrics, ainsi que le passage des animaux dans les parcelles, va permettre d’enfouir 90 % des stolons.
Pâturage et pérennité du trèfle : l’importance d’une bonne gestion prairiale (Gérer l’herbe pour le trèfle, J. Brock, botaniste pastoral néo-zélandais)
Le trèfle blanc a besoin d’un accès à la lumière pour se développer, étendre ses stolons enterrés et réussir à établir de nouvelles racines. Par conséquent, garder une masse d’herbe trop importante, dû au pâturage tardif d’un paddock ou des résiduels élevés, provoque l’élongation des pétioles du trèfle. Cette croissance aérienne se fait au détriment des réserves racinaires et se répercute sur la ramification et l’étalement des trèfles. Les stolons qui restent donc en surface sont plus sensibles aux périodes sèches et au surpâturage. Même si, visuellement, la flore paraît riche en trèfles par la présence de plantes à grandes feuilles, la réalité est tout autre : les légumineuses sont peu nombreuses, car leur développement se fait à partir du stolon initial.
La bonne gestion des résiduels et du stade d’entrée dans le paddock est donc fondamentale. Un pâturage bien mené en fin d’hiver fournit une herbe de printemps de qualité. En permettant à la lumière d’atteindre la base des végétaux, ce premier « ratissage » favorise le tallage des graminées et le développement des stolons des légumineuses. Des conditions favorables à la production de feuilles riches sur le plan alimentaire.