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    Comment concilier l’élevage ovin et bovin ? Le cas du GAEC de Rubian en Bretagne

    Antoine Corre et Chloé Cabillic sont installés en bio dans le Finistère. Le pâturage tournant dynamique pour les ovins et les bovins a été rodé parallèlement à l’augmentation des cheptels. Les éleveurs ont trouvé un équilibre entre performances techniques et organisation des journées avec la vente directe qui représente le débouché de 95 % des animaux.

    • 97 ha de SAU dont 20 ha de prairies naturelles, 10 ha de céréales d’hiver, 5 ou 7 ha de céréales de printemps
    • Agriculture biologique
    • 62 vêlages de limousines
    • 120 brebis Landes de bretagne
    • vente directe pour 95 % des animaux : bœufs de 30 à 36 mois, vaches, veaux rosés de six mois et agneaux
    • 2 unités de main d’œuvre

    A Plogonnec dans le Finistère, Antoine Le Corre et Chloé Cabillic ont mis en place le pâturage tournant dynamique depuis cinq ans. Cela faisait alors déjà quelques années qu’ils s’étaient lancés dans l’élevage et ils disposaient d’une structure déjà très fonctionnelle. « Mon père élevait des vaches laitières et avait développé depuis trente ans un système herbager. Il était passé d’une vaste plaine à une ferme bocagère en agriculture biologique, avec 29 paddocks de 2,5 ha » raconte Antoine.

    Pour sa part, il a choisi la production de viande. Il a démarré avec dix limousines il y a douze ans et a fait croître le cheptel en interne. Il faisait alors tourner les lots sur ces parcelles de 2,5 ha toutes les 72 heures. « J’avais du mal à bien valoriser les surfaces faute d’animaux au début. J’avais de toute façon des lacunes sur le pâturage ». Antoine a alors cherché des ressources.

    Des ressources qu’il a trouvées dans la technique diffusée par Pâture Sens par le biais de formations, et dans des groupes d’échanges entre éleveurs qui partagent sa vision du métier. Antoine n’a pas souvenir d’avoir trouvé difficile la mise en place du pâturage tournant dynamique. « Il y a eu des moments un peu tendus pendant les années sèches, mais je ne suis jamais descendu en dessous de dix jours d’avance d’herbe. » De quoi voir venir et se préparer. « Je suis d’un naturel assez prudent. Je choisis de garder une marge de sécurité, quitte à ne pas tirer le maximum possible des surfaces. »

    Pour l’éleveur, le pâturage tournant dynamique est très pratique mais il représente une certaine charge de travail d’astreinte si on veut être performant. Le troupeau limousin est aujourd’hui arrivé à 62 vêlages en système naisseur engraisseur et est conduit en quatre lots. Presque tous les animaux sont vendus en direct, avec un laboratoire de découpe à la ferme, et cela représente une charge de travail incompressible et importante. Une troupe de 120 brebis de race Landes de Bretagne est également à gérer. Et la culture d’une quinzaine d’hectares de céréales est à assurer.
    « J’aime bien faire les céréales, et elles me permettent de faire tourner une partie des prairies pour les renouveler. Mon système est autonome sur le plan alimentaire. »

    Antoine n’achète aucun concentré (et pas de fourrage). Les céréales produites sont surtout distribuées aux agneaux en finition et brebis en lactation. Les bovins n’en consomment que peu.

    Aujourd’hui, les éleveurs disposent de 80 ha de prairies groupés, tous préparés en paddocks avec des chemins et un réseau d’eau partout. Au retour de la première formation, les paddocks de 2,5 ha ont été divisés par trois (et l’aménagement des tuyaux d’arrivée d’eau a suivi partout). Les clôtures sont fixes et subdivisées avec des fils pour clôtures semi-permanentes. Les mères limousines sont maintenant conduites en deux lots d’une trentaine de vaches. « Je fais des paddocks de 30 à 35 ares pour une durée de 24 heures, qui sont possiblement utilisés par deux, soit 65 ares pour 48 heures de temps de présence » explique Antoine. « Quand j’ai des autres travaux qui m’empêchent de passer voir tous les lots tous les jours, ça me donne de la souplesse. »
    Il a bien observé le gain d’efficience par rapport à une conduite en paddocks de 72 heures telle qu’il pratiquait auparavant. Le nombre d’animaux présents en phase d’élevage comme en phase d’engraissement a augmenté. Il vend en effet deux gros bovins, un veau rosé et quatre à six agneaux par mois en vente directe (avec un fichier client conséquent, qui a progressé en même temps que l’effectif des troupeaux). Cinq autres bêtes ont été vendues en circuit long cette année.

    « Je n’ai pas vraiment de ration d’engraissement. Les bœufs sont finis au pâturage entre 30 à 36 mois, je vends des veaux rosés de six mois à leur sevrage, et les femelles sont engraissées seulement à l’herbe aussi » observe Antoine. « Je distribue des céréales aux bovins seulement si j’en ai assez et uniquement pendant la phase en bâtiment qui dure en général de mi-décembre à fin février. » Le lot de vaches qui est fini pendant la période en bâtiment reçoit 2,5 à 3 kg par jour du mélange triticale pois féverole, et les vaches en lactation en consomment également quelques centaines de grammes par jour sur cette période. « J’ai du foin et de l’enrubannage de haute qualité.»

    Les prairies temporaires sont des mélanges à flore variée sur une base de RGH, RGA, trèfle blanc et trèfle violet et elles sont aptes à être pâturées comme récoltées, en foin ou en enrubannage. Du plantain a été introduit sur une grande partie d’entre elles et se ressème d’ailleurs naturellement sur d’autres parcelles. Ce sont les brebis qui assurent le déprimage sur toutes les surfaces, ce qui prend plus de temps que si c’était fait avec les bovins mais présente moins de risque d’impact avec leurs 60 kg par tête. Puis ce déprima est suivi d’un passage rapide des bovins sur toutes les prairies à flore variée. Ensuite quand la pousse démarre, les lots de bovins suivent le circuit préétabli et à partir en général de fin juillet, les surfaces attribuées par jour sont doublées. En septembre, la pousse de l’herbe redécolle et les lots sont resserrés.
    En cette mi-novembre 2021, Antoine arrive au 9ème ou 10ème tour sur les prairies, et tout le monde est encore dehors sauf les brebis qui mettent bas. Ensuite suit un mois environ au cours duquel les vaches rentrent pour la nuit et sont affouragées en bâtiment puis ressortent pour la journée. Elles passent finalement deux mois à deux mois et demi sans sortir du bâtiment.
    Les vingt hectares de prairies permanentes humides sont surtout exploités par les brebis. « Je les conduis comme en techno-grazing avec des filets, en préparant trois paddocks d’avance. » Des chevaux y passent également en alternance avec les brebis. « Je vois que le lotier et les trèfles s’installent, et le potentiel alimentaire de ces praires devient intéressant après quelques années comme ça. »

    Antoine a aussi vu l’évolution favorable de la flore sur des prairies qu’il a reprises alors qu’elles étaient utilisées de longue date auparavant comme « parking » pour vaches laitières.

    « Elles avaient une couche de feutre de 5 à 7 cm et un sol asphyxié. J’ai fait passer les brebis et les bovins, notamment sous une grosse pluie pendant laquelle le piétinement a été bien présent. Au bout de deux ans, le trèfle commence à revenir, le ray grass prend de l’ampleur, le chiendent régresse et ces parcelles vont être un peu plus intéressantes. Plus tard je vais probablement y faire une céréale et réimplanter ensuite une prairie à flore variée. »

    Du fumier est apporté sur un maximum de parcelles différentes chaque année, et un chaulage est aussi réalisé avec du sable coquillier.
    Au total sur la campagne, environ 80 ha ont été récoltés (dont 40 ha en une fois). Ce sont un peu toutes les parcelles qui sont fauchées, mais en fonction du passif de chaque parcelle, certaines des plus productives le sont quand même plus souvent. « La valorisation annuelle totale, fauche et pâturage, commence entre 3-4 tMS/ha pour certaines prairies, représente en moyenne à 7-9 tMS/ha pour d’autres, et monte à 11 tMS/ha pour les plus productives » résume l’éleveur.

    Au départ, son objectif était de faire vêler sur deux périodes – début août et début février – mais avec l’augmentation du cheptel en même temps que la croissance des besoins de réformes pour la vente directe, il a laissé les vêlages se répartir davantage sur l’année. Antoine envisage, maintenant que son effectif est stabilisé, de changer de stratégie. Grouper les vêlages sur septembre octobre permettra de mieux valoriser les quelques mâles qui ne sont pas castrés. Ils sont vendus broutards au sevrage et sortiraient ainsi à la période la plus porteuse, en mai juin. Antoine arrivera à répartir sur l’année la sortie pour la vente directe des bœufs finis entre 30 et 36 mois, des vaches réformées à plusieurs périodes de l’année, et des veaux rosés. Il vend aussi chaque année quelques génisses et quelques mâles pour la reproduction.

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